CASSE-TÊTE POUR LE VISA CHINOIS
Comme je l'ai écrit dans le dernier article, je pensais faire
mon visa chinois au Kirghizistan. Cependant, après mettre longuement renseigné
sur internet et sur les forums de voyage, je me suis aperçu que la tâche
n’était pas gagnée d’avance. La plupart des voyageurs ayant fait leur visa
chinois à Bichkek sont passés par une agence déboursant au minimum 100 € en plus
des 40 € de visa. Etant donné le prix, j’essayerais sans passer par une agence, mais sans succès. Je décide donc
de passer par le Kazakhstan où apparemment à Almaty, le visa est moins
contraignant à obtenir, chaque ambassade chinoise ayant ces propres règles.
Le passage de frontières est très simple : un coup de
tampon pour la sortie du Kirghizistan et un coup pour l’entrée au Kazakhstan
qui me permet de rester 15 jours dans le pays. Je me dirige directement vers Almaty, à 200 km de la frontière, le mardi 27 octobre. Etant donné qu’il me
manque des documents pour postuler pour le visa, je ne peux aller à l’ambassade
le mercredi et dois attendre le vendredi. Il faut en plus d’une lettre
d’invitation, remplir un formulaire, la confirmation d’un vol aller/retour
Almaty – Urumqi, même si je compte passer par la voie terrestre et deux photos
dans un format spécial, différent du format des photos de passeport. Autant
de documents aussi inutiles que difficiles à se procurer.
Le vendredi, la réponse est la même qu’à Bichkek :
« vous ne pouvez pas postuler avec une lettre d’invitation qui ne vient
que d’une amie. » Ce visa commence sérieusement à m’énerver, mais par
chance, je rencontre un homme travaillant dans une agence me proposant de me
procurer une lettre d’invitation officielle pour le lundi suivant pour moins de 10 €.
J’arriverais enfin à postuler le lundi et n’aurais payé que 28 € pour le visa
et la lettre d’invitation, bien loin des 140 € de Bichkek. Je récupérerais mon visa le lundi 09 novembre.
KAZAKHSTAN
Le Kazakhstan est de loin le pays que j’ai le moins aimé
jusqu’alors. Je ne suis resté d’ailleurs quasiment qu’à Almaty, plus grande ville du Kazakhstan. La première
semaine je la passerais à galérer pour obtenir mon visa et me promènerais un
peu dans la ville. Il n’y a rien à faire dans cette ville nouvelle où toutes
les rues se ressemblent. Seul la cathédrale orthodoxe vaut un coup d’œil.
La deuxième semaine, je visite les montagnes aux
alentours d’Almaty. Malheureusement il a neigé dans la semaine et il est donc
impossible de randonner, il faut rester sur les grands chemins.
J’essayerais de sortir de cette ville, mais les autres villes que je verrais
sont encore plus tristes qu’Almaty. Les
alentours ne sont faits que de steppes interminables. Je n’ai que six jours et
n’ai donc pas tellement envie de faire 2600 km pour aller à Astana, la capitale et
revenir.
Cette semaine est donc faite de marches dans les rues
monotones d’Almaty et dans ces alentours et de préparations du voyage en Chine. Rien
de très passionnant en somme. Le lundi, je récupère mon visa à 16h et tend aussitôt
le pouce vers la Chine. Je n’ai pas l’intention de passer la frontière le jour
même, mais souhaite me rapprocher pour la passer le lendemain, dernier jour de
validité de mon visa kazakhe. Après trois petits lifts, j’ai la chance de tomber sur un
chauffeur d’origine turque qui m’emmène directement à la frontière et qui me
propose aussi de m’héberger. Je ne pouvais pas mieux quitter le Kazakhstan, moi
qui me suis plaint de ce pays pendant deux semaines.
XINJIANG (CHINE)
Me voilà enfin en Chine. Je rencontre beaucoup de Chinois
Hans (l'ethnie principale chinoise) dans la ville frontalière, mais aussi une bonne partie d’Ouïghours, la
minorité ethnique de la Chine de l’Ouest. Dans cette ville frontalière, la langue
est toujours le russe, je peux ainsi toujours me faire comprendre, un peu comme un
sas de décompression avant de se retrouver dans la Chine profonde. Le
changement le plus radical se voit au niveau des bâtiments : du bêton, du
bêton et encore du bêton. Le nombre de bâtiments en construction
m’impressionne, même si cela reste raisonnable en comparaison au reste de la
Chine. Mais ça je ne le sais pas encore.
Après un premier bol de nouilles chinoises, je tends le
pouce vers Urumqi à 650 km de la frontière. Je me sens un peu bête à faire du
stop en Chine pensant que ce n’est pas commun et que personne ne comprend mon pouce levé. J’ai
la même sensation que la première fois que j’ai levé le pouce au moment du
départ : un peu penaud, se demandant si quelqu’un va s’arrêter. Après 15
minutes d’attente, une voiture s’arrête, me prends sur une cinquantaine de km,
mais me laisse sur la bande d’arrêt d’urgence de l’autoroute. J’arrive
cependant à arrêter rapidement une autre voiture qui va directement à
Urumqi. Mon chauffeur m'emmène donc sur 600 km, soit mon record de distance avec une voiture en stop pour le moment. Le conducteur est Chinois, mais parle un peu
anglais et surtout russe donc nous n’avons pas trop de mal à communiquer.
Panneau écrit en Chinois et en Ouïghour (alphabet arabe.) |
En allant à Urumqi nous nous arrêtons dans une ville voisine alors
qu’il fait nuit. Impressionnant toutes ces lumières, toutes ces enseignes qui
clignotent. On a l’impression qu’aucune ruelle ne doit rester sans lumière.
Alors qu’en France on éteint la Tour Eiffel pour faire des économies d’énergie,
la Chine se doit de décorer le moindre de ses bâtiments avec les plus belles
lumières. Je n’ose imaginer la consommation d’électricité utilisée uniquement
pour ces artifices. Malheureusement, je n'ai pas pris de photo.
Urumqi n’a rien d’extraordinaire, une ville comme beaucoup d’autres.
Le bazar ouïghour vaut tout de même le coup d’être vu.
Enfant ouïghour |
Urumqi est aussi l'occasion de voir dans les parcs, pour la première fois, les Chinois faire leur danse traditionnelle... |
... ou tout autres exercices |
Je pars donc assez vite pour Turpan (ou Tourfan), ville ouighour plus
traditionnelle. La ville et les alentours sont situés dans une dépression, ce
qui fait que la ville se situe au niveau de la mer et que le point le plus bas
se situe à 150 mètres en dessous de la mer. Elle est aussi réputée pour être un
des points les plus chauds de Chine. Ce ne sera pas le cas quand j’y serais, il
fera une dizaine de degré tout au plus.
Le peuple ouïghour a des origines turques et est musulman. Je serais surpris qu'à plusieurs reprises des Ouïghours me disent qu'ils sont désolés pour la France, suite aux attaques du 13 novembre. Eux qui sont si souvent accusés de terrorisme par les Chinois, ils doivent savoir de quoi ils parlent (voir ci-dessous.)
Minaret Emin |
La banlieue est elle aussi très belle, les bâtiments étant
principalement en terre. Cependant si vous voulez la visiter, dépêchez-vous, une
grande partie est déjà détruite pour être remplacé par de grandes tours en
bêton. Immonde.
... En partie rasée pour construire des buildings |
LE PEUPLE OUÏGHOUR
Le peuple Ouïghour est une des 55 minorités ethniques de Chine. L'ethnie principale, les Hans représentent 92 % de la populations chinoises. Concernant le Xinjiang, 45 % de la population de la région est Ouïgour et 41 % est Han. Cependant, cette région autonome a une superficie de 1 660 000 km² (environ 3 fois la France) mais n’est peuplé que de 23 millions de personnes, la grande majorité du territoire étant du désert.
Le gouvernement chinois essaye de motiver les Hans à s'installer dans cette région, officiellement pour la développer. Des subventions et des aides financières sont accordées aux Hans qui s'y installent. Par ailleurs plus il y a de Hans dans cette région et plus il est facile pour le gouvernement de garder le contrôle de celle-ci. La même chose est faite dans d'autres régions autonomes du pays, zones où il y a des minorités ethniques, comme le Tibet. Les Tibétains comme les Ouïghours sont aujourd'hui des étrangers dans leur pays.
Urumqi, la capitale du Xinjiang est plus peuplé de Hans que d'Ouïghours. Les protestations de ces derniers réclamant une autonomie et les nombreux heurts entre policiers et locaux font d’Urumqi, une ville où la présence policière et militaire est très importante. Cette ville étant la première que j'ai vu de Chine, j'ai été surpris par le nombre de militaires et de chars anti-émeute qui sont véritablement à chaque coin de rue.
La répression que subit le peuple ouïghour et l'écrasement de sa culture est quotidienne dans le Xinjiang. Pour exemple, le port du voile islamique est interdit, les fonctionnaires sont obligés de manger en public les jours de ramadan ou encore les restaurants ouïghours doivent obligatoirement vendre de l'alcool et des cigarettes. Les tensions avec les forces de l'ordre sont alors inévitables et finissent souvent en bain de sang. A chaque fois, les autorités mettent cela sur le dos du terrorisme internationale qui recruterait en Chine des Ouïghours musulmans.
Pour aller plus loin sur la répression du peuple ouïghour deux articles de Ursula Gauthier :
- Au Xinjiang, contraints de vivre dans la terreur et la misère
- Après les attentats, la solidarité de la Chine n'est pas sans arrière pensée. (Cette article a été écrit après les attentats du 13 novembre et a valu à son auteure de voir sa carte de presse chinoise retirée et d'être expulsée de Chine.)
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